Etude
Etude SeLoger
Les médias s’en emparent : force est de constater que la loi Climat et résilience peine à être pleinement respectée, notamment sur l’interdiction, depuis le 1er janvier 2025, de louer un bien classé G, mais aussi sur l’obligation de publication du DPE, active depuis 2021. L’équipe scientifique de SeLoger, en tant qu’observateur privilégié du marché, livre un état des lieux, à date, de la non-conformité du marché locatif en France, et notamment à Paris.
Nous constatons sur SeLoger une baisse significative de l’offre de biens G à la location qui suggère que la loi Climat et résilience porte ses fruits. Cependant, l’enjeu est de connaître la nouvelle destination de ces biens : sont-ils rénovés comme le voudrait la loi ? Ou sont-ils détournés de leur fonction locative dans un marché tendu via la location de courte durée par exemple.“
ETUDE EXCLUSIVE SELOGER
Les principaux enseignements
- Au cours de l’année 2024, en France, la qualité énergétique des logements du parc privé locatif s’est améliorée avec une diminution de -16% du nombre de mises en location de logements classés G. Cette baisse pourrait notamment s’expliquer par un effet d’anticipation de l’interdiction de location d’un bien G au 1er janvier 2025.
- Cependant, au 15 janvier, 2,3% des annonces - dont le DPE est renseigné - concernent toujours des biens classés G (vs 3,2% ces deux dernières années).
- De même, malgré une amélioration notable depuis 2021, 18% des annonces de location ne respectent pas l’obligation de publication du DPE (contre 37% en juillet 2021, date de l’interdiction).
- Avec la plus grande part d’annonces non conformes au 15 janvier, soit 35% d’annonces sans DPE (une annonce sur 3) et 4,7% d’annonces de biens G, c’est à Paris que la loi Climat et résilience peine le plus à être respectée !
Une offre locative qui semble de meilleure qualité...
La loi Climat et résilience a visiblement impacté le marché locatif français en 2024, à l’approche de l’interdiction de location de biens classés G. En effet, alors que le stock global de biens à louer a doucement commencé à se reconstituer - notamment grâce au retour des acquéreurs sur le marché de l’achat depuis le printemps 2024 - l’offre locative de biens G, elle, n’a pas suivi cette tendance. Une baisse de -16% de mises en location de biens classés G a été observée en 2024, contre une hausse de +11% pour les biens classés A/B/C/D/E et F.
Avec plus de 2,44 millions de logements rénovés entre 2020 et 20241, la rénovation énergétique pourrait expliquer en partie cette tendance. Cela dit, le recul des mises en location de biens G pourrait aussi refléter une forme d’attentisme de la part de certains propriétaires. En effet, face à l’incertitude législative, ceux-ci ont pu préférer sortir temporairement leurs biens G du marché locatif, avant de s’engager dans des travaux souvent très coûteux.
Résultat : au 15 janvier, 2,3% des annonces - dont le DPE est renseigné - concernent toujours des biens classés G, soit un recul d’un point de pourcentage par rapport à ces deux dernières années.

Nous constatons sur SeLoger une baisse significative de l’offre de biens G à la location qui suggère que la loi Climat et résilience porte ses fruits. Cependant, l’enjeu est de connaître la nouvelle destination de ces biens : sont-ils rénovés comme le voudrait la loi ? Ou sont-ils détournés de leur fonction locative dans un marché tendu via la location de courte durée par exemple.
Quant à l’impact de cette baisse de biens à louer sur la tension, déjà existante, du marché locatif, il est pour nous marginal. En effet, seules 2,3% des annonces de location avec DPE concernent des biens classés G. Cette part est minime et sa disparition ne viendrait pas considérablement accentuer le phénomène de pénurie de biens à louer, qui est en fait principalement lié au durcissement des conditions de crédit.
... même si le DPE n’est pas systématiquement renseigné dans les annonces.
Depuis l’entrée en vigueur de l’obligation de publication du DPE en juillet 2021, la part des annonces sans DPE a été divisée par deux. Cependant, au 15 janvier, 18% des annonces de location en France n’indiquent toujours pas de DPE (contre 37% au 1er juillet 2021).
Cette diminution est la traduction concrète des effets de la loi sur le marché de la location, même si on peut s’interroger sur la part de biens G potentiellement dissimulée derrière ses annonces sans DPE renseigné.


L'éclairage de Thomas Lefebvre
Mesurer l’impact d’une loi c’est avant tout, et surtout, regarder d’où l’on vient. Et si l‘on considère la situation antérieure à la loi, l’amélioration est nette : la part des annonces sans DPE a été divisée par 2, ce qui est une belle avancée. Un effort commun de sensibilisation doit toutefois être entrepris par tous les acteurs du marché pour atteindre une réelle transparence et permettre aux porteurs de projets d’intégrer sereinement la performance énergétique dans leurs critères de recherche.
ZOOM SUR PARIS
Paris concentre la plus grande part d’annonces non conformes
Avec 4,7% d’annonces locatives G et 35% d’annonces sans DPE renseigné, Paris se distingue des autres segments2 avec la plus forte part d’annonces qui ne respectent pas la loi. Notons toutefois une amélioration : la part de biens G à la location était de 5,9% il y a 1 an et de 6,7% il y a 2 ans.

Pourquoi la capitale est-elle particulièrement loin des objectifs fixés par la régulation ? Tout d’abord, sa structure l’expose naturellement plus que les autres segments avec un parc constitué à 35% de passoires thermiques (vs 17% en France)3. Ensuite, son marché locatif demeure très tendu, ce qui peut amener certains propriétaires à faire fi de la loi par opportunité et des locataires à ne pas en tenir compte par manque de choix.
Enfin, a contrario de la tendance observée en moyenne en France (-16%), les mises en location de biens G ont augmenté à Paris de +13% en 2024. Une hausse néanmoins moins importante que pour les autres types de biens (+28% pour les F et +24% pour les biens A/B/C/D/E).
- Note 2/ vs le segment France entière, le Top 10 et le Top 50 (plus grandes villes au sens de l’INSEE)
- Note 3/ Fidéli, Ademe
Que constate-t-on depuis le 1er janvier et la nouvelle interdiction ?
Depuis le début de l’année, la mise en location des biens G est interdite. Or, sur SeLoger, nous observons toujours de nouvelles publications d’annonces de tels biens sur les deux premières semaines de janvier. Il y en a en revanche moins, avec -87% de publications de biens G à la location, par rapport à la même période l’année passée. Nous notons en revanche une hausse significative de la publication d’annonces sans DPE (+57% par rapport à la même période l’année passée). Cette hausse pourrait laisser entendre qu’une partie des biens G est dissimulée parmi ces annonces sans DPE ou encore que les propriétaires de ces biens sont en attente d’un diagnostic.
Ainsi, la réglementation actuelle semble se confronter à une réalité de marché complexe, comme c’est le cas à Paris. L'écart entre les intentions législatives et leur application concrète interroge sur l'efficacité réelle de ces mesures. D’ailleurs, bien que la loi de 2021 ait introduit la notion d’opposabilité du DPE, en pratique aucune mesure d’accompagnement spécifique n’est mise en place pour faciliter les démarches des locataires lésés.
La conclusion de Thomas Lefebvre
Face à ce constat, SeLoger informe au mieux ses clients, professionnels de l'immobilier notamment, et les met en relation avec des acteurs de la rénovation énergétique lorsque cela est nécessaire, afin de les accompagner dans le respect de leurs obligations légales. Notre mission c’est aussi d’éclairer la décision publique grâce à l’analyse de nos données. C’est, par exemple, le sens de nos travaux sur les effets de l’encadrement des loyers. Bannir les annonces non-conformes de notre site serait nier la réalité du marché et en empêcher toute compréhension.


