Ce n’est pas une exposition des dessins de Plantu juxtaposés aux photographies de Reza et vice-versa qui vous attend au Musée de l’Homme. La chose serait évidemment intéressante mais insuffisante tant le regard porté par ces deux artistes, à la fois perçant et tendre, est celui de deux frères d’art. A couvrir l’un et l’autre, chacun à sa manière, les grands conflits de ces dernières décennies, à questionner ainsi les activités humaines et les évènements de ce monde, ils ont nourri au fil des années une vision commune et complémentaire exprimée d’une voix fraternelle.

Plantu et Reza font connaissance au Mémorial de Caen en avril 2011. Ils se croisent alors aux Rencontres internationales du dessin de presse et la complicité de naître. En 2020, ils projettent leurs travaux sur un même écran, puis livrent une série d’œuvres communes dans un livre publié en 2021 chez Gallimard. Le Musée de l’Homme présente ces œuvres-là, ainsi que quelques objets signifiants : livres, magazines et objets personnels sélectionnés par les conservateurs au domicile de chacun des artistes. La présence d’un gilet pare-balles aussi. L’un et l’autre défendent la liberté d’expression ….

Iran, 1974. Reza est emprisonné et torturé pour avoir affiché, sur les murs, des photographies dénonçant la misère. En France, les attentats de Charlie Hebdo dévoilent au monde les risques courus par les dessinateurs. Plantu vit depuis huit ans sous protection policière constante. Tous deux attachent une importance précieuse à la défense de nos libertés. Ils envisagent aussi, avec une acuité certaine, les droits des femmes et des enfants, les défis environnementaux et les tragédies vécues par les migrants. De leur oeuvre commune, présentée par le Musée dans une grande pièce lumineuse et apaisante, ils suscitent chez le visiteur le questionnement et la réflexion. Regardons-nous le monde suffisamment droit dans les yeux ? Sans doute pas autant que Plantu et Reza. Mais cette heure passée en compagnie de leurs oeuvres invitera chaque visiteur à prendre le pouls du monde et à reconsidérer sa propre posture.