Tribune libre
Par Charles Loiselet
Dimanche matin. Café en main, je réfléchis à cette nouvelle proposition de loi qui anime les débats dans notre secteur : la Loi Le Meur. Après plusieurs échanges avec des confrères, une question fondamentale me vient à l’esprit : jusqu’où peut-on limiter le droit de propriété au nom de la régulation ?
Derrière cette loi, une idée simple : permettre aux copropriétés, via une majorité accessible, d’interdire la location meublée de courte durée. En pleine crise du logement, cette mesure interroge. Non pas parce qu’il ne faut pas encadrer les abus – il y en a –, mais parce que, encore une fois, on pénalise tout le monde pour sanctionner quelques fautifs.
D'autant que cela est symptomatique de notre incohérence : On est très content de trouver de la courte durée ailleurs mais on n’en veut pas chez soi.
Un glissement dangereux pour le droit de propriété
Ce qui me dérange profondément, c’est que cette loi touche à un principe fondamental : celui de pouvoir disposer librement de son bien. Une restriction inédite à la liberté de jouissance des propriétaires qui pose la question de sa constitutionnalité.
En creusant, on s’aperçoit que le débat dépasse largement la location courte durée. Aujourd’hui, une AG de copropriété pourrait, par une majorité accessible, interdire un type de location. Et demain Pourquoi ne pas aller plus loin et valider le profil des locataires en AG ?
Ce n’est pas de la science-fiction : dans certains pays, un acheteur potentiel doit passer un entretien devant la copropriété pour obtenir le droit d’acquérir un logement. Inenvisageable en France ? Peut-être. Mais avec cette loi, on déplace doucement mais sûrement la fenêtre d’Overton, c’est-à-dire l’éventail des idées considérées comme acceptables par la société.
Et si on s’attaquait plutôt aux vrais problèmes ?
Cette loi, bien qu’animée par la volonté de réguler le marché locatif, pourrait avoir des conséquences profondes sur l’investissement immobilier et sur la protection du droit de propriété et ainsi décourager l’investissement locatif.
Plutôt que d’interdire, pourquoi ne pas sanctionner plus efficacement les véritables abus ? Pourquoi ne pas renforcer les règles de bon voisinage et leur application ? Pourquoi ne pas encourager un dialogue plus constructif entre voisins, plutôt que d’armer les uns contre les autres à coups de règlements restrictifs ?
Oui, les AirBnB gênent les voisins dans certaines copropriétés mais les interdire ne règleront en rien la crise du logement qui trouve d'autres origines. De même qu'un bail classique peut trouver un locataire dérangeant pour ces voisins...
La copropriété est un écosystème fragile où chacun doit composer avec l’autre. Plutôt que d’interdire, pourquoi ne pas responsabiliser ?
Le débat est ouvert.
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