Face aux défis sociaux et environnementaux liés à l’augmentation de la population et au réchauffement climatique, la densification urbaine est la solution proposée par le législateur depuis une dizaine d’années afin de lutter contre l’étalement urbain et l’artificialisation des sols.
A titre d’exemple, en 2014 le Coefficient d’occupation des sols (COS) a été supprimé afin de favoriser cette densification. Cette suppression a impacté les outils tels que le bonus de constructibilité ou le contrôle de division des terrains bâtis. Le COS permettait d’estimer la densité de construction admise sur un terrain en fixant le nombre de mètres cubes pouvant être construits par mètre carré de sol.
Avec cette suppression, la division parcellaire s’en trouve facilitée et permet aux propriétaires de maisons implantées sur de grands terrains de créer une parcelle distincte, pouvant être vendue une fois détachée en gardant sa maison et un jardin réduit. Il s’agit en effet de fractionner une unité foncière en plusieurs morceaux distincts constituant déjà, ou non, des parcelles cadastrales identifiées, en vue de pouvoir les céder individuellement. Elle doit faire l’objet d’une autorisation d’urbanisme. Il existe plusieurs types d’autorisations, selon le projet du propriétaire.
La réglementation est peu évidente à saisir, y compris par les professionnels du secteur, et l’accompagnement spécifique de professionnels du droit est toujours bienvenue en cette matière
1 - La notion d’unité foncière
Il sera liminairement rappelé une notion essentielle du droit de l’urbanisme, pourtant fréquemment oubliée par les professionnels de l’immobilier : celle de l’unité foncière.
Une unité foncière est constituée d’«un îlot de propriété d'un seul tenant, composé d'une parcelle ou d'un ensemble de parcelles appartenant à un même propriétaire ou à la même indivision »
Par exemple il a pu être reconnu en jurisprudence que deux parcelles contiguës dont la première est en pleine propriété alors que la seconde est en indivision forment deux unités foncières distinctes (CAA Lyon, 2 mai 1995, Cne de Passy, n°93LY01025, aux tables), ou que deux parcelles relevant d’un même propriétaire mais traversées par une voie publique, les parcelles situées de part et d’autre de cette dernière forment autant d’unités foncières distinctes (CAA Lyon, 26 septembre 1995, Cne de Cannes, n° 94LY01695).
Ainsi plusieurs parcelles cadastrales contiguës, même acquises par différents actes indépendants à plusieurs années d’intervalle, constituent une unité foncière. Il doit ici être souligné que pour le droit de l’urbanisme la notion d’unité foncière ne tient pas compte des divisions cadastrales. Dans ce cas, si l’on décide de céder l’une d’entre elles, il y aura "division" devant faire l’objet d’une autorisation administrative, même s’il n’y a aucune nécessité de division cadastrale.
Cette autorisation est différente selon le projet du propriétaire du terrain en cause.
Les références à connaître
- Conseil d'Etat, 27 juin 2005, n°264667
- CAA Lyon, 2 mai 1995, Cne de Passy, n°93LY01025
- CAA Lyon, 26 septembre 1995, Cne de Cannes, n° 94LY01695
2 - Le lotissement
Le code de l’urbanisme définit le lotissement en son article L442-1. Il s’agit d’une division en propriété ou en jouissance (via un bail à construction, un bail emphytéotique, ou un bail de droit commun assorti du droit de construire) d’une ou plusieurs unités foncières afin de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis.
L’autorisation nécessaire à une telle division varie selon qu’elle a vocation à créer ou non des terrains à bâtir mais dans tous les cas la règle d’urbanisme trouvera à s’appliquer à l’échelle du terrain avant division et non lot par lot, sauf si le règlement du PLU s’y oppose.
Pour les permis de construire sollicités sur les lots aménagés, le code de l’urbanisme prévoit une cristallisation des règles d’urbanisme dans le périmètre du lotissement pendant 5 ans à compter de l’obtention de l’autorisation permettant de diviser le terrain.
a- La division en vue de bâtir plusieurs terrains
Si la division est réalisée en vue de céder un ou plusieurs terrains destinés à être bâtis elle sera nécessairement constitutive de lotissement et soumise soit à la procédure de déclaration préalable (DP), soit à celle du permis d’aménager (PA). À défaut d’obtention d’autorisation préalable, le vendeur sera considéré comme « lotisseur de fait » et passible de sanctions pénales lourdes prévues aux articles L480-4-1, L480-15 et L480-16 du Code de l’urbanisme (jusqu’à 15 000 euros d’amende et annulation de la vente dans certains cas).
L’article R421-19 du code de l’urbanisme fixe les cas de lotissement pour lesquels un permis d’aménager est exigible. Il s’agit des cas de détachement de plusieurs terrains à bâtir pour lesquels il est prévu la réalisation de voies, d’espaces ou d’équipements communs à au moins deux d’entre eux.
Pour protéger les acquéreurs de tout terrain à bâtir issu d’un PA, le Code de l’urbanisme impose la réalisation des travaux d’aménagement au lotisseur, en conformité avec ceux mentionnés dans l’autorisation délivrée, et ceci avant toute vente des lots en étant issus (sauf exceptions prévues aux articles R442-13 à R442-17 du code de l’urbanisme). C’est la raison pour laquelle en pratique, une opération soumise à permis d’aménager est dans la grande majorité des cas, réalisée par un professionnel disposant, au contraire d’un particulier, des fonds nécessaires au financement préalable d’études, de constitution de dossier, et des travaux des aménagements communs préalablement à la cession des lots créés.
Toujours pour protéger les futurs acquéreurs, il n’est pas possible de consentir une promesse de vente sur le terrain avant l’obtention du permis d’aménager et aucun acompte ne peut être accepté. Après la délivrance de l’autorisation, seule une promesse de vente peut être conclue. La vente définitive des lots ne peut intervenir qu’à l’achèvement complet des travaux ou, s’il y a été autorisé, à compter de l’achèvement des travaux autres que de finition. Également, l’obtention des permis de construire portant sur les lots créés ne peut en principe se faire qu’à l’achèvement des travaux d’aménagement et après la constatation de cet achèvement.
b - La division sans projet de construction ou pour la construction d’un seul terrain à détacher
L’article L442-3 du Code de l’urbanisme n’exige qu’une déclaration préalable pour les lotissements qui ne sont pas soumis à la délivrance d’un permis d’aménager. Il s’agit donc essentiellement des divisions qui n’emportent pas à court terme un projet de construction. Toutefois, une division prévoyant la création d’une voie, d’espaces ou d’équipements communs à un ou plusieurs lots bâtis et un unique terrain à bâtir ne relève pas du permis d’aménager, mais bien de la déclaration préalable évoquée ci-après.
Cette procédure est beaucoup plus facile à respecter, le dossier étant plus simple à constituer car ne comprenant outre le formulaire de demande, qu’un plan de situation, un plan de masse de l’existant, un plan du projet de division envisagé. Elle est cependant bien moins protectrice du futur acquéreur.
Les références
- Articles L480-4-1, L480-15 et L480-16 du Code de l’urbanisme
- Article R421-19 du code de l’urbanisme
- Articles R442-13 à R442-17 du code de l’urbanisme
- Article L442-3 du Code de l’urbanisme
3 - Les divisions de terrain ne relevant pas de la procédure de lotissement
L’article R442-1 du code de l’urbanisme prévoit les cas d’exception pour lesquels les divisions pouvant être pourtant opérées en vue de construire ne relèvent pas de ces deux procédures (PA ou DP).
a - La division primaire
La division dite « primaire » est la division en propriété ou en jouissance effectuée par un propriétaire au profit de personnes qui ont obtenu un permis de construire ou d’aménager portant sur la création d’un groupe de bâtiments ou d’un immeuble autre qu’une maison individuelle (article R442-1 a) du Code de l'urbanisme).
Dans ce cas, le pétitionnaire de la demande de permis de construire n’est pas le propriétaire du terrain, mais le futur acquéreur.
La division doit intervenir après la délivrance du permis de construire et ce dernier doit comprendre un plan de division. Lorsque des voies et espaces communs sont prévus, le dossier de permis de construire est complété par le projet de constitution d’une association syndicale des acquéreurs à laquelle seront dévolus la propriété, la gestion et l’entretien de ces voies et espaces communs (sauf en cas de copropriété ou de convention de transfert avec la commune ou l’EPCI)
Les avantages de la division primaire résident dans la simplicité et rapidité de la procédure qui permet tout à la fois de faire réaliser l’opération par un tiers, de diviser le terrain et de le céder, sans qu’il soit nécessaire d’obtenir d’autre autorisation administrative que la délivrance d’un permis de construire qui sera instruit dans les conditions et délais habituels. En outre, aucune pièce spécifique n’est requise dans le dossier de demande de permis de construire et le nombre de divisions primaires sur une même propriété foncière n’est pas limité.
Le reliquat de terrain conservé par le propriétaire reste constructible via la seule délivrance d’un nouveau permis de construire, ou d’un permis d’aménager selon la procédure de lotissement évoquée ci-avant.
Cependant, cette procédure implique pour le propriétaire du terrain de demeurer propriétaire d’une partie de l’unité foncière et la division primaire ne permet pas de régler la question des travaux de viabilisation du terrain. Ces derniers devront être envisagés dans un cadre contractuel entre le propriétaire du terrain et les futurs acquéreurs.
b - Le permis de construire valant division
Le permis de construire valant division (PCVD) est possible dans le cas de la construction sur une unité foncière ou plusieurs unités foncières contigües, de plusieurs bâtiments dont le terrain d’assiette doit faire l’objet d’une division en propriété ou en jouissance avant l’achèvement de l’ensemble du projet (article R431-24 du code de l’urbanisme).
Il faut donc la réalisation d’au moins deux bâtiments distincts, peu important leur nature ou leur destination.
Un arrêt relativement récent du Conseil d’Etat est venu purger une incertitude des praticiens en la matière en confirmant que la règle d’urbanisme doit être appliquée au terrain initial (l’unité foncière) et non à la seule partie de terrain destinée à être détaché (Conseil d’Etat 12 novembre 2020, SCI 3 rue Jules Gautier, n°421590). Dans l’hypothèse où, postérieurement à la division du terrain mais avant l’achèvement des travaux, le pétitionnaire dépose une demande de permis modificatif, il y a lieu d’apprécier la légalité de cette demande sans tenir compte des effets de la division intervenue, sauf si le règlement du PLU s’y oppose. En conséquence, les aménagements prévus doivent être réalisés sur la totalité du terrain avant division pour permettre l’obtention du certificat de conformité.
Cette procédure permet d’aboutir à une division de l’unité foncière en ne sollicitant qu’un permis de construire, celui-ci autorisant à la fois la division du terrain, sa viabilisation et la construction des bâtiments. La division peut être relativement rapide puisqu’elle doit intervenir avant l’achèvement des travaux et non préalablement à l’obtention du PC comme en matière de lotissement. Ainsi, le ou les titulaires peuvent décider de réaliser les travaux de viabilisation visés dans le permis ou les laisser à la charge de l’un des futurs propriétaires de terrain(s) divisé(s).
Toutefois dans le cadre du permis de construire valant division, il est recommandé, avant de demander le permis de construire, de se mettre d’accord avec les futurs acquéreurs sur la consistance du projet, la répartition du terrain, le délai de réalisation des travaux, le paiement de la taxe d’aménagement … Le PCVD impose que l’ensemble du projet soit précisément défini à la date du dépôt du dossier de demande de PC, ce qui enlève beaucoup de souplesse à l’opération.
Il existe dans le cadre du PCVD une solidarité des co-titulaires du permis quant au respect de ses prescriptions et de son exécution qu’ils soient co-pétitionnaires de la demande dès l’origine, ou qu’une partie du permis soit ultérieurement transférée partiellement. L’administration vérifiera à l’issue du chantier la conformité du permis de construire originel, sans distinguer les conditions de sa mise en œuvre.
c - Autres cas particuliers
Le code de l’urbanisme envisage d’autre cas dans lesquels il est possible de diviser une unité foncière, sans pour autant relever de la procédure de lotissement. Il s’agit :
- des détachements de terrains supportant des bâtiments qui ne sont pas destinés à être démolis ;
- des détachements de terrain d’une propriété en vue d’un rattachement à une propriété contiguë
- des détachements de terrain par l’effet d’une expropriation, d’une cession amiable consentie après déclaration d’utilité publique
- des détachements de terrains réservés acquis par les collectivités publiques dans le cadre du droit de délaissement
- des divisions effectuées dans le cadre d’une opération de remembrement. Toutefois dans le cas où l’unité foncière est située dans un périmètre de remembrement clôturé depuis moins de dix ans, il conviendra de recueillir, avant détachement et par application de l’article L123-17 du Code rural, l’accord de la Commission départementale d’aménagement foncier. À défaut, l’acte pourra être annulé dans les trente ans suivant sa signature.
- des divisions effectuées par l'aménageur à l'intérieur d'une zone d'aménagement concerté
Enfin, il doit être précisé qu’à l’exception du contrôle administratif découlant de la nécessité de vérifier que la division envisagée ne compromet pas gravement le caractère naturel des espaces, la qualité des paysages ou le maintien des équilibres biologiques article L115-3 du Code de l’urbanisme) ou une opération de remembrement (article L123-17 du Code rural), la division d’une propriété bâtie en plusieurs lots bâtis dont les constructions doivent être conservées ne nécessite aucune autorisation administrative.
Néanmoins, comme pour tout projet de division, l’emplacement d’une future limite divisoire doit être décidée avec soin en envisageant les possibilités d’implantation et les caractéristiques des constructions existantes et conservées et servitudes éventuelles à constituer ou à conserver. Il convient de tenir compte de la réglementation applicable au terrain dont la division est envisagée : il peut être concerné par plusieurs zones différentes d’un même document d’urbanisme applicable, ou partiellement frappé par un plan de prévention des risques.
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