Accélération des mouvements vers des régions déjà attractives par le passé et des ensembles de taille plus modeste.
L’étude est intéressante dans son intégralité mais trois enseignements méritent d’être relevés : Une étude INSEE publiée le 16 mars 2022 analyse les flux migratoires post-covid en se basant sur plusieurs indicateurs rendant compte des déménagements récents en France. Parmi ces indicateurs, il y a notamment les données de la Poste via les contrats de réexpédition du courrier, mais aussi des données fiscales notamment via les déclarations de revenus, le répertoire statistique des véhicules routiers (RSVERO), les DSN, ou encore les données de la DARES sur le télétravail.
Sur la base de ces informations qui constituent un faisceau d’indices qui devraient être confirmés par les chiffres du recencement, l’INSEE confirme le mouvement initié en 2020 de départ des grandes métropoles urbaines et Paris ainsi qu’une accélération des mouvements vers des régions déjà attractives par le passé et des ensembles urbains de taille plus modeste.
L’étude est intéressante dans son intégralité mais trois enseignements méritent d’être relevés :
- Une baisse d’attractivité des grandes aires et des grandes métropoles
- Un renforcement de la périurbanisation au sein des grandes métropoles au bénéfice des couronnes par rapport aux pôles.
- Une baisse d’attractivité des grands pôles urbains à l’égard des familles avec jeunes enfants.
Une baisse d'attractivité des grandes aires
Entre 2019 et 2022, le ratio des entrées sur les sorties de l’aire de Paris est passé de 0,38 à 0,30 selon les données RSVERO. La propension à conserver sa voiture lors d’un déménagement a certes évolué au cours de la dernière décennie, au gré des politiques visant à favoriser les mobilités douces dans les centres urbains, notamment à Paris. Mais le constat issu des données RSVERO est cohérent avec celui émanant des données sur les réexpéditions de courrier.
Avant la crise, les grandes aires de plus de 700 000 habitants hors Paris avaient une attractivité globalement positive. Entre 2013 et 2018 s’y installaient davantage d’habitants qu’ils n’en partaient, sauf pour Lille et Grenoble. Au cours de cette période, ce solde migratoire positif révélé par le recensement de la population est aussi visible dans les données RSVERO, avec, en 2018, un ratio entre les entrées et les sorties en métropole légèrement supérieur à 1. Entre 2019 et 2022, ce ratio diminue de 14 %, traduisant pour ces grandes aires une tendance post-crise similaire à celle de l’aire de Paris. Les données de La Poste mettent en évidence, elles aussi, cette baisse d’attractivité pour les grandes aires (-8 %), alors même, compte tenu des différences de champ, que le niveau initial du ratio des entrées sur les sorties issu des données de La Poste est très légèrement inférieur à 1.
Au sein des grandes aires y compris celle de Paris, les déficits migratoires au profit des autres aires s’accentuent, et cela concerne aussi bien les communes du pôle que celles des couronnes. Mais pour ces dernières, le déficit est en partie compensé par le renforcement de la périurbanisation.
La périurbanisation se renforce au sein des grandes métropoles
Quelle que soit la taille de l’aire d’attraction des villes, les pôles perdent des habitants dans leurs échanges avec leurs couronnes. Durant la période 2017-2019 qui précède immédiatement la pandémie, selon les données de réexpédition de La Poste, le ratio des entrées sur les sorties de la couronne par rapport à son pôle croît avec la taille des aires : de 1,2 dans les aires de moins de 50 000 habitants à plus de 2 dans les aires de plus de 700 000 habitants.
Dans les grandes aires, l’éloignement des centres urbains s’accentue à partir de 2020. En 2021, dans les aires de plus de 700 000 habitants, les couronnes accueillent depuis leur pôle 2,68 fois plus de ménages qu’il n’en part. Par exemple à Lyon, pour 100 transferts de courrier de la couronne vers le pôle, on compte 330 transferts dans l'autre sens. Pour l’aire de Paris, le mouvement de périurbanisation du territoire se renforce : la couronne accueille de plus en plus de nouveaux arrivants en provenance du pôle au regard des départs. Le ratio des entrées sur les sorties augmente fortement, de 1,87 en 2019 à 2,15 en 2022, avec un pic à 2,38 en 2021.
Les variations sont moins marquées pour les aires de 200 000 à 700 000 habitants. Elles sont faibles ou inexistantes dans les aires de moins de 200 000 habitants.
À la faveur de la crise, les couronnes des métropoles semblent avoir ainsi accentué leur attractivité par rapport aux pôles, mais l’ont vue se détériorer par rapport aux plus petites aires. Les couronnes de ces dernières ont sensiblement profité de ce mouvement, avec des flux accrus en provenance aussi bien des grands pôles urbains que de leur périphérie, mais n’ont pas ou peu bénéficié d’une plus forte attractivité au niveau local. Les familles avec jeunes enfants semblent avoir contribué à l’ensemble de ces mouvements.
Le télétravail, facteur d'évolution des comportements
Les évolutions différenciées mises en évidence au sein des territoires tiennent sans doute pour partie aux possibilités nouvelles qu’offre le télétravail. Selon l’information sur la pratique du télétravail à partir de l’enquête Emploi en continu et les données du recensement, une corrélation peut ainsi être établie à l’échelle des départements entre le profil des emplois et les tendances en matière de migrations résidentielles : c’est dans les départements où les emplois apparaissent les plus compatibles avec le télétravail que le ratio des entrées sur les sorties mesuré à partir des données de réexpédition de La Poste a le plus baissé entre 2018 et 2021. Il en est ainsi des départements d’Île-de-France, du Rhône et de la Haute-Garonne, où les fonctions métropolitaines et les emplois de bureau sont surreprésentés.
L’hypothèse du lien entre télétravail et migrations résidentielles semble confirmée par l’évolution des distances domicile-travail. Selon les déclarations sociales nominatives, la distance pour se rendre à son lieu de travail varie assez peu entre 2019 et 2021 dans les grandes aires (Paris et celles de plus de 700 000 habitants), sauf pour les trajets les plus longs correspondant aux 10 % des salariés les plus éloignés de leur lieu de travail l’année considérée. La distance minimale parcourue par ces 10 % de salariés les plus éloignés de leur lieu de travail augmente légèrement pour les emplois plutôt non télétravaillables (+5 % dans les aires de plus de 700 000 habitants), mais plus vivement pour les emplois plutôt télétravaillables (+14 %). Le caractère télétravaillable est ici évalué par une classification des métiers assise sur l’enquête Tracov de la Dares de 2021. Pour l’aire de Paris, les tendances sont de même nature (respectivement +7 % et +13 %), ce qui semble traduire un éloignement plus important du pôle pour les salariés ayant la possibilité de télétravailler. Un tel constat est spécifique aux aires les plus peuplées.
Une baisse d’attractivité des grands pôles urbains à l’égard des familles avec jeunes enfants
Avant 2019, le nombre d’élèves scolarisés dans le premier degré dans l’aire de Paris diminuait plus faiblement qu’au niveau national (-0,2 % par an entre 2015 et 2019, contre -0,5 %), que ce soit dans le pôle ou la couronne. Dans les autres grandes aires (Montpellier, Aix-Marseille, Lyon, etc.), le nombre d’enfants scolarisés dans le premier degré augmentait légèrement. Dans les trois métropoles de l’Ouest (Nantes, Bordeaux, Toulouse), il s’accroissait davantage dans le pôle qu’au sein de la couronne.
À l’inverse, dans les aires de plus petite taille (moins de 200 000 habitants), le nombre d’élèves diminuait plus que la moyenne nationale, en particulier dans les couronnes. Dans les couronnes des aires de 50 000 à 200 000 habitants, ce nombre baissait chaque année de 1,3 % en moyenne entre 2015 et 2019.
En 2021, contrairement à la période précédente et dans un contexte de baisse démographique de la classe d’âge concernée plus prononcé que les années antérieures (-1,4 %, après -0,5 % en moyenne annuelle entre 2015 et 2019), c’est dans les pôles de Paris et des grandes aires que le recul est le plus marqué. En outre, au sein de l’aire de Paris, un fort contraste apparaît entre le pôle (-2,1 %) et la couronne (+0,1 %). Dans les aires des autres grandes métropoles également, les pôles (-1,6 %) deviennent moins attractifs que les couronnes (-0,6 %). Dans le même temps, dans les aires de moins de 200 000 habitants, la diminution devient, en 2021, du même ordre qu’au niveau national, alors qu’elle était plus vive sur la période 2015-2019.
Source : Insee
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