Réaction de Laurent Dubois, fondateur de Monsuperlocataire.fr
L’Agence départementale d’Information sur le Logement de Paris (Adil 75) a noté une augmentation importante du nombre de congés illégaux (18 % en 2022 contre 28 % sur la période septembre 2023/mars 2024), délivrés par des propriétaires au mieux mal informés...
En cause, l’approche des Jeux Olympiques et Paralympiques et les gains importants escomptés par certains bailleurs grâce à la mise en location de courte durée (nuitée ou semaine) d’un logement habituellement loué, vide mais surtout meublé, à titre de résidence principale. Nous constatons un cruel manque d’information chez Monsuperlocataire.fr, que ce soit côté propriétaires et côté locataires. Que peut faire un propriétaire ? Quels risques sont-ils encourus si un propriétaire donne congé à son locataire pour loger des touristes en courte durée ?
Un gain objectif mais une stratégie risquée
En effet, un appartement meublé à usage de résidence principale dans le 18e arrondissement de Paris loué 1 400 €/mois pourra trouver preneur autour de 250 €/nuit durant la période olympique. Soit un gain de 3 250 € en quelques semaines à peine.
Mais il s’agit d’un très mauvais calcul…En effet, un congé frauduleux est entaché de nullité et le bailleur peut se voir condamné à payer une amende pouvant atteindre 6 000 € maximum (15 000 € pour une personne morale, type SCI). Rappelons que le congé ne peut être signifié qu’à l’échéance du bail (trois ou six ans) dans trois cas précis, prévus à l’article 15 (location nue) ou 25-8 (meublée) de la loi du 6 juillet 1989 :
• S’il souhaite vendre le logement, en location nue le locataire dispose d’un droit de préemption ;
• S’il souhaite l’occuper lui-même à titre de résidence principale ou y loger un membre de sa famille ;
• S’il peut justifier d'un motif légitime et sérieux comme un manquement du locataire à ses obligations.
De plus comme le dit l’adage, « on sait qui l’on quitte, on ne sait pas qui l’on prend ». S’il ne fait aucun doute que, passée la période olympique, les bailleurs retrouveront sans difficulté un nouveau locataire, compte tenu de la tension locative actuelle, rien ne prouve que ce dernier soit aussi bon payeur que le précédent.
Le meublé saisonnier très encadré à Paris et sa première couronne
Louer en meublé saisonnier à Paris et en première couronne un bien qui est votre résidence principale - que vous en soyez propriétaire ou locataire - est autorisé sans formalités dans la limite de 120 jours par an.
Au final, le « jeu » n’en vaut vraiment pas la chandelle !
Mais attention, si vous êtes propriétaire bailleur et que vous souhaitez louer en meublé saisonnier il vous faudra effectuer une demande de changement d’usage en Mairie car un meublé touristique n’est plus considéré comme un logement.
Dans certaines villes qui souhaitent maîtriser la prolifération des logements “Airbnb” et maintenir un équilibre entre le parc résidentiel et les logements de tourisme, cette autorisation pourra être assortie d’une compensation. C’est le cas de Paris. Ne pas respecter cette obligation est passible d'une amende pouvant aller jusqu'à 50 000 €. La remise en l'état initial du logement et une astreinte de 1 000 € par jour et par m2 peuvent aussi être ordonnées.
Exemple
Pour un appartement de 2 pièces de 42 m² loué meublé dans le 18e arrondissement de Paris pour un loyer de 1 400 € charges comprises :
- En location classique : le propriétairegagne 1 400€/mois avant impôt
- En donnant congés à son locataire pour louer pendant les JO, son loyer passe à1 750€/semainesur une base de 250€ / nuit soit 7 750€ pour 1 mois (avec un taux d'occupation à 100%).
Le gain supplémentaire potentiel est donc de 6 350€ avant impôt (7 750€ -1400€), mais en cas d’amende, pour avoir donné congés illégalement : 6 350€ - 6 000€ = 350€ de gain, sans prendre le coût du délai de relocation à la fin de la période olympique (environ 15 jours, soit 700 € de loyer non perçu durant cette période de vacance) et les éventuels frais pour de petits travaux (1 000 €)
Mais ce n'est pas tout... Le bailleur s'expose aussi à d'autres amendes :450 €pour non-déclaration en mairie, 5 000 €pour défaut d'enregistrement et 50 000 € pour ne pas avoir demandé un changement d'usage. Soit unmanque à gagner qui peut atteindre... 55 100 € !
Le rendez-vous hebdomadaire du média digital et podcast Les Ondes de l'Immo pour une information immobilier et logement décryptée par les décideurs influents de l'immobilier.