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Assurance en copropriété : la loi Chatel oubliée du Code des assurances ? Avec Charles Bohbot, BJA Avocats

Interview

Le point juridique du mois avec Charles Bohbot et BJA Avocats

Un syndicat de copropriétaires peut-il résilier un contrat d’assurance reconduit tacitement sans avoir été informé à temps ? La question mérite d’être posée, tant le vide juridique profite  peut etre (trop bien) à certains assureurs… C’est en ces termes que l’avocat Charles Bohbot pose le sujet sur ses réseaux sociaux, un sujet qu’il est venu exposer ici au studio. Vous l’avez compris nous allons parler de la loi Chatel …

 

Interview

LA SYNTHÈSE

Par Charles Bohbot

Un syndicat de copropriétaires peut-il se prévaloir des dispositions de l’article L215-1 du Code de la consommation pour résilier un contrat d’assurance reconduit tacitement, en l’absence de notification conforme de l’assureur ? Je vous soumets ci-après quelques éléments de réponse, articulés en trois temps.

 

 

1- Le cadre juridique applicable

Les textes issus de la loi Chatel :

  • L’article 1er de la loi du 28 janvier 2005 a introduit dans le Code de la consommation l’ancien article L136-1, aujourd’hui codifié à l’article L215-1. Ce texte impose au prestataire professionnel d’informer, dans un certain délai, le consommateur de la reconduction tacite du contrat, à défaut de quoi ce dernier peut le résilier à tout moment.
  • L’article L215-3 étend expressément ce dispositif aux personnes non professionnelles, personnes physiques ou morales.
  • Les dispositions spécifiques du Code des assurances : L’article L113-15-1 impose aux assureurs une obligation d’information sur la résiliation à échéance, mais cette disposition est réservée aux personnes physiques non professionnelles. L’article L113-15-2, issu de la loi Hamon, permet à ces mêmes assurés de résilier leur contrat à tout moment après un an. Ces deux dispositifs, bien que complémentaires, relèvent de régimes juridiques distincts.

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2 - La qualité de non-professionnel reconnue au syndicat des copropriétaires

Jurisprudence constante. 

  • Par arrêt du 23 juin 2011, la Cour de cassation a jugé qu’aucune disposition du Code de la consommation ne faisait obstacle à l’application de la loi Chatel à une personne morale non professionnelle, et a reproché à une cour d’appel d’avoir refusé ce bénéfice à un syndicat.
  • Cette solution a été confirmée par deux arrêts du 25 novembre 2015 (1re civ.) : d’une part, la représentation du syndicat par un syndic professionnel ne lui retire pas sa qualité de non-professionnel ; d’autre part, l’application de la loi Chatel ne suppose pas de mandat exprès du syndic pour résilier.
  • L’arrêt du 29 mars 2017 a réaffirmé cette jurisprudence, précisant que l’article L215-1 s’applique également aux personnes morales non professionnelles, et pas uniquement aux personnes physiques.
  • Les commentaires doctrinaux récents (Coutant-Lapalus, Vigneron, Lebatteux) s’accordent à reconnaître que le syndicat est une personne morale non professionnelle et peut donc bénéficier du régime protecteur du Code de la consommation, à condition que celui-ci ne soit pas écarté par un texte spécial.

3 - Application à l’encontre des assureurs : deux thèses possibles

a) Thèse de l’exclusion fondée sur la spécialité.

Le Code des assurances constitue un régime spécial régissant les obligations d’information de l’assureur en matière de reconduction tacite. En application du principe lex specialis derogat generali, certains assureurs considèrent que seul ce code est applicable. La doctrine défendue par les compagnies d’assurance repose sur l’idée que l’article L215-1 du Code de la consommation ne s’applique pas aux contrats d’assurance. Cette lecture est confortée par une réponse ministérielle du 18 octobre 2018, selon laquelle les syndicats de copropriétaires ne peuvent se prévaloir de L113-15-1.

b) Thèse de l’application : suppléance du droit commun

Le Code des assurances n’offre aucune protection aux personnes morales non professionnelles, ce qui crée un vide juridique. Le régime général de l’article L215-1 du Code de la consommation pourrait donc s’appliquer de manière supplétive. Cette interprétation a été retenue par la cour d’appel de Bastia (22 février 2017), qui a admis l’application de L136-1 (devenu L215-1) à un contrat d’assurance, au motif que le texte ne réserve pas son champ aux contrats hors assurance et que la personne morale concernée n’était pas professionnelle.

L’article L215-1 prévoit expressément que ses dispositions s’appliquent « Les dispositions du présent article s'appliquent sans préjudice de celles qui soumettent légalement certains contrats à des règles particulières en ce qui concerne l'information du consommateur. » Cela signifie, selon cette lecture, qu’en l’absence de texte spécial applicable à un type de cocontractant (ici : personne morale non professionnelle), le droit commun continue de jouer.

Cette solution, bien qu’encore marginale, s’accorde avec la finalité de la loi Chatel : lutter contre les reconductions tacites subies du fait de l’absence d’information, ce qui affecte autant les syndicats de copropriétaires que les consommateurs individuels.

Conclusion

Le syndicat de copropriétaires remplit les critères pour être qualifié de non-professionnel au sens de l’article L215-1 du Code de la consommation. À défaut d’être couvert par les articles L113-15-1 et L113-15-2 du Code des assurances, il peut faire valoir que le régime général reste applicable en l’absence de disposition spéciale.

En pratique, cette position risque d’être contestée par les assureurs ou leurs courtiers et non encore tranchée par la Cour de cassation. Elle présente néanmoins un fondement juridique sérieux, susceptible d’être soutenu dans un contentieux. Une évolution législative serait souhaitable sur ce point ?

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Anne-Sandrine Di Girolamo
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